Cahier de doléances et des vœux que font les habitants et communauté de Prunay en conformité du règlement annexé aux lettres de convocation des États généraux qui doivent se tenir à Versailles le 22 avril 1789.
Messieurs les Commissaires et députés qui doivent diriger (sic) le cahier général du tiers état du Baillage de Reims soient suppliés par les habitants de Prunay de vouloir bien y insérer les motifs qui les engagent à adresser au roi et à la nation ses respectueuses représentations pour les choses ci-après expliquées.
Le village est situé dans un endroit très humide et très marécageux ; cela est occasionné par le reflux de l'étang de Sillery qui rend les rues du village impraticables et altère la solidité des bâtiments et rend une partie des meilleures terres du dit terroir incultes et dans le temps que les blés poussent leurs épis et que les brouillards s'élèvent sur le dit étang et s'étendent sur les campagnes , cela occasionne des dommages considérables sur les terroirs les plus voisins. Il est certain que, si cet étang était corrigé d'un degré plus bas, cela soulagerait le village et les inondations ne seraient plus si dangereuses.
Le village est composé de 110 feux, les habitants s'occupent à la culture des terres dans l'espérance d'être récompensés de leurs travaux ; mais la trop grande quantité de gibier qu'il y a sur le terroir est nuisible et mérite la plus grande attention dans les espèces qui détruisent les récoltes, tels sont les lièvres et autres gibiers ; il y a tels seigneurs qui oubliant tout sentiment d'humanité et de commisération préfèrent la conservation de leur gibier à la douce satisfaction qu'ils devraient en donner en épargnant la dévastation des campagnes et d'une denrée nécessaire à la nourriture de l'homme.
Nous sommes obliges de convenir que nous avons été trop longtemps exposés à tous ces inconvénients mais que, depuis que Mr Le Marquis de Sillery est seigneur de Prunay, il a bien voulu être sensible aux plaintes de ses vassaux en faisant détruire de son gibier. Nous espérons que son zèle le portera à tout pour nous rendre heureux.
Du sel
Le sel est d'un prix exorbitant et de première nécessité à la vie , il serait de l'avantage public que le prix en soit modéré, cela procurerait aux pauvres un avantage d'augmenter sa salaison de chair, fromage et autres denrées prévues à saler ; ils en vivraient mieux, ils en seraient plus forts et plus résistants aux travaux.
Cela encouragerait les cultivateurs à faire des élèves et des engrais qui pourraient faire circuler le commerce des denrées salées. Cela donnerait des facilités aux bourgeois, des villes et des campagnes, d'en avoir à plus juste prix.
Des tailles et autres compositions
Les tailles, capitations et autres impositions sont très hautes. Il est néanmoins nécessaire de soutenir l'État. On pourrait modérer ces impôts à l'égard du Tiers et assujettir le Clergé et la Noblesse à y contribuer d'autant qu'ils possèdent les biens les plus productifs et les plus avantageux du Royaume comme rivières, étangs, moulins, fermes, prairies et bois et autres biens les plus rapportants.
Des entretiens des routes
La conversion des corvées en nature étant un impôt en argent ne peut être qu'applaudi par le peuple., en ce qu'il est moins onéreux que la corvée en nature. Cet impôt peut même acquérir de la modération pour le Tiers État, si, comme nous l'espérons, le Clergé et la Noblesse, par des sentiments d'équité et de justice, contribuent à cet impôt et répondent aux intentions bienfaisantes du roi.
Du tirage des milices
La levée des milices est un abus qui pourrait être réformé , c'est un très pesant fardeau pour les pères et mères qui ont des garçons sujets à ce sort. Cela occasionne des dépenses considérables, principalement ceux qui sont éloignés des villes ; il faut contribuer aux conventions entre garçons, quoique les lois ne permettent pas d'en faire, il est cependant d'usage. On pourrait lever un impôt, quoique modique, produirait un capital avantageux avec lequel on pourrait procurer de beaux hommes de bonne volonté et de zèle pour le service de sa Majesté (1).
De l'office du juré-priseur
L'office du juré priseur est établi dans les campagnes depuis peu de temps , cet office est très nuisible aux pauvres mineurs qui ont perdu leurs pères et mères., quand il y a nécessité de faire inventaire ou vente des meubles.
Cet officier qui est éloigné de quatre à cinq lieues s'approprie d'une partie des dits meubles. en percevant des droits qui excèdent quelquefois le prix de l'inventaire ou vente.
Cet abus devrait être supprimé d'autant que les Seigneurs ont des officiers de justices en leurs seigneuries qui pourraient procéder aux inventaires ou vente de meubles à prix plus modiques, et les procès-verbaux d'inventaire ou vente renfermés aux greffes des lieux pour y recourir au besoin.
Le présent cahier fait et rédigé par nous , habitants de Prunay, pour être présentés à Messieurs les Députés qui doivent diriger (sic) le cahier général du tiers état du Baillage de Reims le 16 mars présent mois par les sieurs Pierre Chaudron et Claude Davis Bahüet, que nous avons députés à cet effet suivant le procès-verbal du courant à Prunay ce 14 mars 1789 et ont les dits Chaudron et Bahüet signés avec nous
Signé: Hourblin, syndic, J.B Hachette- J.B. Chaudron, Barbier, Bahüet, etc..... (24 signatures)
(1) En marge, une mention indique que cet article est " à noter ".
Cahiers de doléances pour les Etats généraux de 1789 Baillage de Reims PRUNAY
(1) Situation administrative et économique - " à 3 lieux de Reims "
Généralités de Châlons.- Election de Reims- Coutume de Reims- Diocèse de Reims, doyenne de Vesle, - Paroisse de St Basle à la présentation de l'Abbé de St Basle- Eaux et forêts de Reins- Aujourd'hui commune du canton de Beine- arrondissement de Reims
(2) Dénombrement de 1773 : 114 feux roturiers et 1 ecclésiastique. Population: 161 hommes, 169 femmes, 39 garçons et 31 filles soit 400 habitants.
Recensement de 1911 : 492 habitants.
(3) Seigneur: Charles Antoine de Beaumont d'Antichamp, abbé de St Basle, chanoine de l'église de Paris, demeurant à Verzy. Charles Alexis Brulart, marquis de Sillery. Genlis, seigneur de Sillery, Puisieulx, Verzenay et Prunay.
(4) Curé : Pierre Lecocq
Territoire : 2302 arpents de terres labourables, 5 de jardins, 61 de prés, 7 de bois, 13 de terres incultes. Récoltes : 1227 boisseaux de froment (3 pour 1), 18165 de seigle (3 pour 1), 1488 d'orge (3 pour 1), 16291 d'avoine (2.5 pour 1), 1775 de sarrasin (6 pour 1) - 15 laboureurs ayant charrue - 49 chevaux 97 bêtes à cornes - 670 bêtes à laine.
Impositions: En 1704, tailles et frais de collecte : 964 livres.
En 1750 1404 livres et 15 sols, pour 121 cotes.
En 1775 taille et capitation réunies : 2539 livres et 4 sols
En 1789 : taille 1029 livres; imp. acc. : 829 livres
capitation :777 1
Total: 2635 Livres
Dîmes- A l'abbé St Basle pour les grosses, aux religieux de cette abbaye
pour les menues- Le curé n'a que sa portion congrue.
(1) " Il n'y a que " les 2 Maisons " pour tout hameau qui dépend de la paroisse ; elles ne sont éloignées que d'une portée de fusil- Le diamètre de la paroisse est d'environ une portée de fusil " ( Enquête de 1774)
(2) " Ils sont presque tous laboureurs " (ibid) et le curé ajoute naïvement " Vices dominants : les sept péchés capitaux "
(3) L'abbé de St Basle fut seul cité comme seigneur de Prunay le 23 février par l'huissier Renat au domicile du procureur fiscal(sans nom) en la justice de Prunay, y demeurant et dont Mr l'abbé de St Basle est seigneur ainsi que " les 2 Maisons "
(4) Il ne figure ni comme comparant ni comme défaillant dans l'exemplaire du procès verbal aux archives de la ville. Cependant, il dut comparaître en personne : Ce doit être une omission. Il prêta le serment et abdique même.
(Document fourni par Mme Maillart " Bibliothèque pour tous") |